mercredi 26 juin 2013

Burn-out


Je tenais à écrire ce billet, pour raconter mon vécu du burn-out toujours dans l'idée que ceux qui en vivent les prémisses se reconnaîtront et réagiront à temps... Mieux vaut prévenir que guérir...

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Il y'a maintenant un peu plus de 12 ans, je quitte la société dans laquelle j'ai suivi ma formation d'informaticien par alternance. Mon responsable de l'époque me remercie en me disant "tu ne mérites pas mieux qu'un SMIC". Par la suite, l'opportunité d'intégrer une société de service m'est offerte. Mon rôle : assurer le dépannage informatique (téléphonique et sur site) et installer les matériels nécessaires aux utilisateurs. Mes petites compétences de passionné d'informatique allaient me servir. Mon travail me plaisait, j'étais reconnu dans le service. On comptait sur moi et j'aimais ça. J'étais envoyé également à travers toute la France. Je vivais ma petite vie d'informaticien comblé, voiture de fonction, téléphone et nuit d'hôtel. Je rencontrais beaucoup de monde et recevais régulièrement des retours positifs des utilisateurs ainsi que de ma direction. De plus, j'avais une certaine autonomie, la confiance que l'on me portait me permettait cela.
Au fil du temps, mes compétences évoluaient, mon "grade" également : d'employé à cadre, de technicien de maintenance à chef de projet. Je m'occupais des "petits" ordinateurs, maintenant des "gros" (serveurs) dans les salles informatique. Je gère maintenant des projets : réunion, organisation et planification (tout ce que je n'aime pas faire).
Les journées n'étaient plus suffisantes pour accomplir mes tâches. Je commençais à rallumer mon ordinateur chez moi le soir, puis les week-end, puis pendant les vacances, puis les nuits..... J'étais de plus en plus appelé pendant mes congés par mes responsables pour des problèmes divers. Cette "toute puissance" me valorisait. Je me sentais indispensable à la société, apparemment le seul à savoir accomplir certaines tâches bien précises.
Petit a petit, une sorte de mauvaise humeur s'installait en moi. Je commençais à ne plus supporter les réflexions, même sur le ton de l'humour. Une sorte de démotivation aussi. Pourtant le travail me plaisait toujours autant.
Par la suite, une société fut rachetée par la mienne. S'ensuit une mutualisation de notre informatique. A ce moment, je dois fournir encore plus d'effort (migration de 300 personnes et donc de toute l'informatique associée).
Depuis plusieurs jours, je commence à avoir du mal à m'endormir. Je suis pourtant fatigué.... mais impossible de m’endormir. Je tourne en rond, gigote, pense, repense, rumine... Autant utiliser mon temps à ne pas dormir pour travailler. Il est 4 heures du matin, je ressors mon ordi, j'ai tellement de travail à abattre! Mon responsable me remerciera...

Une soirée entre femme est organisée. Je suis donc de "garde" avec les enfants. Je sens déjà que la soirée sera difficile car le simple fait de fermer les yeux et je m'endors sur le canapé. Une fatigue jusqu'à maintenant jamais vécue... Je commence à me sentir étrange.... comme angoissé... et d'un coup une lourdeur sur les épaules, comme si on me déposait des sacs de ciment sur chacune d'elles! Je sens vraiment mes épaules "tomber". Mes muscles m'abandonnent, à bout de ressources. Un frisson me parcours, du bas de mon dos au sommet de ma nuque?!? L'angoisse s'amplifie, je suis seul avec mes enfants, que se passera t il si je fais un malaise? Je décide de coucher mes enfants précipitamment pour ne pas avoir à les gérer si jamais je fais un malaise (on me trouvera par terre mais au moins les enfants n'assisteront pas à la scène).
Les enfants sont couchés, je tourne en rond dans mon salon. Je me sens perdu, plus possible de réfléchir calmement, des milliers d'idées me traversent l'esprit, des choses insignifiantes, des images, des idées, tout un mélange incohérent de pensées. Que faire? je décide d'aller me coucher. Nuit catastrophique évidement.
Je me réveille dans le même état qu'en me couchant. Je me sens mal, angoissé, plus démotivé et fatigué que jamais mais je pars malgré tout au travail, en oubliant la moitié de mes affaires, laissant une fenêtre ouverte, mon ordinateur etc. Je manque même d'écraser quelqu'un à un passage piéton, plus aucune attention, impossible de me concentrer ne serait-ce que sur ma conduite.
Tous les jours sont éprouvants, mon esprit se focalise sur ce mal être devenu si profond.
Je commence à ne plus avoir faim, d'ailleurs je ne peux plus manger. Restaurant un soir entre amis (auquel je n'ai pas envie d'aller à cause de tout ce chamboulement). Je prétexte une envie d'aller aux toilettes pour vomir. Je perds 8 kg en 1 mois...
On commence à me demander ce que j'ai, je deviens livide, je ne rigole plus, je m'isole. Envie de pleurer...
Au bout de trois longs et interminables mois, j'en parle à ma femme. Incompréhension totale de sa part, elle pense que le problème vient d'elle. La discussion par la suite n'est pas ouverte sur le sujet. J'en parle également à mon responsable qui me dit que la charge de travail actuelle n'est que ponctuelle et que bientôt, le rythme habituel reprendra son cours. Je continue donc à vivoter, tant bien que mal jusqu'au jour ou je décide d'abandonner le combat.
Je prends donc rendez-vous chez le docteur en urgence, premier rendez vous du matin. Je lui explique mon aventure, j'essaye de me contrôler pour pouvoir lui expliquer précisément mon ressentit. Son verdict est rapide :"un petit coup de déprime, je vais vous donner des petits calmants". Je lui réponds que je pense que c'est bien plus profond que cela et que je pense faire une bêtise si on m'enlève pas ses pensées de ma tête. Il décide donc de m'administrer des antidépresseurs. Je commence donc le traitement sans aucune recommandation de sa part. Au bout de 3 ou 4 jours, le soir, je suis tremblant, en sueur, en panique! ma première crise de panique! Je décide d'appeler les urgences, ce n'est plus possible il faut que ça cesse, et rapidement! La personne que j'ai au téléphone me conseil de poursuivre le traitement car il n'est efficace qu'au bout de 2 semaines minimum et d'y ajouter un décontractant musculaire juste pour ce soir. Il me recommande surtout d'aller voir un psychiatre. Coup de chance, je prends la place d'un rendez vous annulé quelques jours seulement après. Le lendemain, premier réflexe étrange, j'appel ma mère... en pleure. N'entendant que mes sanglots, sa première question est "qu'est il arrivé aux enfants?!?" ma réponse sera "c'est ton fils qui va mal!". J'arrive enfin chez le psychiatre. Impossible de lui dire ne serait-ce que "bonjour". Je suis en pleurs, impossible de m'arrêter. J'arrive juste à lui dire que je ne comprends pas ce que j'ai...
Il sort un vieux "grimoire" (appelé DSM pour Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders) de psychiatre et me fait lire un texte contenant des symptômes (lire page 496 du livre DSM (pas du document PDF)) auxquels je réponds à chaque fois oui de la tête pour dire que je suis concerné. Le verdict tombe, je suis en pleine dépression associée à des crises d'angoisses. Mon traitement est réévalué, il m'administre un antidépresseur appelé Paroxétine, plus adapté à mon cas, et aussi un anxiolytique appelé Lysanxia. Arrêt de travail de 2 semaines pour que le traitement aie bien le temps d'agir. Quelques jours suffisent enfin à calmer ma tristesse et mes angoisses... enfin, une petite éclaircie...
Les 2 semaines passent et je retourne au travail. Mes collègues ne me reconnaissent plus. J'ai changé physiquement et psychologiquement. Certains me conseillent d'arrêter les médicaments, pensant que c'est cela qui me détruit, d'autres de me ressaisir (j'adore ces gens là......).
J'entreprends ensuite une psychothérapie et décide de prendre rendez vous...

To be continued....

Illustration : Certains "crament" parmi d'autres le tout dans l'indifférence la plus totale...

20 commentaires:

  1. Merci de partager votre vécu avec nous. C'st un témoignage important pour moi qui travaille dans le social, avec u public particulièrement exclu et surtout discriminé. C'est difficile de faire la part des choses entre vie privée et professionnelle et heureusement que je peux faire des petits breaks. Je suis rentrée de quelques jours chez des amis bien décidée à ne plus me laisser envahir. Votre récit si précis va m'y aider encore plus. Nos échanges sont un encouragement pour moi à me discipliner avec la méditation, ce que je ne fais pas assez, même si j'en vois à chaque fois les bienfaits. Belle soirée à vous!
    TPM

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    1. Bonjour TMP

      Si déjà vous avez la volonté de changer, 50% du chemin est fait. Il ne reste plus qu'à apprendre et appliquer.
      On a tous du mal à tenir nos engagements, mais c'est humain, nous ne sommes pas infaillibles. Il suffit de rattraper le coup.

      Il n'est jamais trop tard pour changer...

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  2. L'illustration est saisissante!!

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  3. Je me reconnaîs dans l'escalade ; elle peut être longue et prendre des années jusqu'à arriver à "maturation". Je reconnais aussi ce que vous décrivez si bien : ce sentiment étrange... Ne pas comprendre ce qu'il se passe en soit, en avoir peur, ne pas réussir à le décripter, à en parler tout de suite et plus tard ne pas réussir à faire comprendre aux autres à quel point on est au bord du gouffre.
    Je me disais "ca doit bien se voir pourtant...?" puis "que faut-il que je fasse quand j'appelle au secours et qu'il ne se passe rien?" (en fait j'ai longtemps appelé au secours du bout des lèvres je ne sais pas si c'est pareil pour vous). J'étais incapable de demander un arrêt de travail, j'aurais eu l'impression de quémander. Je me disais que j'allais finir par faire une grosse bétise (genre tout plaquer et disparaître purement et simplement mais je n'ai eu ni le courage ni l'energie à ce moment là) et que tout le monde tomberait bien sûr des nues.

    Tout, absolument tout me semblait être une torture, surtout les gestes du quotidien, me rendre à mon travail (la gorge tellement serrée que j'avais du mal à respirer), m'occuper de mes enfants (je me crispais dès qu'ils entraient dans la même pièce que moi). Je me sentais dans un étau, perpétuellement. Je me sentais seule aussi.Et que dire de cette colère qui m'accompagnait quotidiennement... Je me sens encore aujourd'hui assez incomprise sur cet épisode de ma vie, à part quand des personnes passées par là en parlent, ce qui me permet de me dire que je n'ai pas inventé tout cela.
    Merci donc pour ces mots.

    Ce qui m'aide vraiment aujourd'hui c'est une meilleure connaissance de ma personnalité et de mon fonctionnement (ou plutôt de mon dysfonctionnement!). Je ne savais pas que j'étais une anxieuse (ça m'enervait que mon médecin me catalogue "anxieuse" j'ai eu droit aussi au lysanxia que je n'ai pas pris...) je suis aussi dans l'hypercontrôle (d'où le refus de prendre des médicaments par exemple). Je suis incapable de déléguer vraiment. Je pensais que je pouvais vivre comme superwoman, je bourrais ma journée et mes minutes par "je peux encore faire ceci ou cela" "j'ai juste le temps de passer faire ci ou ça", bizarrement je procrastinais aussi (sans doute pour récupérer un peu), je courrais partout et tout le temps et j'étais fière de cette vie à 200 à l'heure sans voir que j'étais usée, que comme vous je ne riais plus, je ne prenais plus de plaisir (pas le temps et encore moins de me détendre). L'escalade à duré des années jusqu'à un problème de santé qui m'a fait prendre le mur (plus tôt que prévu on va dire).
    Aujourd'hui je me bats contre ces démons car ils sont toujours là. J'aime l'adrénaline des journées speed...je suis encore loin d'être sauvée mais je suis vigilante et je continue mon travail.
    Et vous? Comment avez-vous repris votre travail? Il est difficile voire impossible de changer radicalement lorsque les autres attendent de vous que vous soyez comme avant... comment résister à ça? La suite sera dans votre prochain témoignage, je patienterai donc!

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  4. Bonjour Blandine

    Je pense que j'ai le don de savoir cacher les choses. Je n'aime pas exposer mes souffrances, donc je souffre en silence. Jusqu'à une certaine limite. C'est pour cela que ça a surpris tout le monde.

    Tout comme vous, tout était épreuve. Les petites tâches du quotidien étaient devenues des corvées. Je n'avais envie que d'une chose : rester au lit. Les seuls à pouvoir comprendre ce que peuvent ressentir les dépressifs sont ceux qui l'ont vécu.. et peut-être/surement les psy(chiatres/chologues/thérapeutes).

    Avant ma profonde remise en question, j'avais tenté un arrêt des médicaments et j'ai rechuté. Je pense que la "dépression existentielle", comme je l'appel, oblige le malade à entrer en introspection. Sans ce travail je pense que c'est difficile de s'en sortir. En ce qui me concerne, sans médicaments, je ne voyais que la mort pour calmer ma souffrance... Il faut peser les avantages par rapport au inconvénients. Les médicaments sont mauvais mais la mort encore plus ;-)

    Et concernant la reprise du travail, comme je le disais je n'ai rien caché de tout cela. Cela figure même dans mes entretiens individuels. C'était une question de vie ou de mort finalement. Je n'avais plus d'autres choix que de changer mes habitudes de travail et cela drastiquement. Au pire, changer d'entreprise voir même de type de travail. J'ai changé de responsable il y'a 3 mois, il est déjà au courant et m'a demandé de l'avertir en cas de coup de mou.

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  5. Officiellement je suis en arrêt longue maladie suite à un problème post opératoire engendrant une maladie chronique. Voila ce que tout le monde sait à mon travail. Mais en arrêtant de travailler la dépression qui a commencé durant l'épisode de maladie (pré opératoire cette fois...oui c'est compliqué) cette dépression s'est intensifiée. Je reprends donc à mi temps thérapeutique mais ce qui me préoccupe le plus n'est pas la gestion de cette maladie chronique (ça me préoccupe aussi mais moins) mais plutôt la gestion d'un éventuel épisode dépressif...et ça tout le monde au travail l'ignore et je ne suis pas sûre de vouloir en parler... A voir...A suivre...

    Pour ce qui est de la prise de médicaments je suis bien consciente que c'est vous qui êtes dans le vrai. J'ai toujours au bcp de mal avec les médicaments... même pour un simple mal de crâne je pouvais attendre une demi journée avant de prendre un cachet (je sais c'est nul). Me voila aujourd'hui avec cette maladie et également en l'absence de thyroïde obligée d'avaler mes médicaments pour vivre. C'est obligatoire! J'ai pris d'ailleurs jusqu'à 12 médicaments par jour au plus fort de ma déchéance. Je dois bien me rendre à l'évidence que j'en ai besoin mais oui, je l'accepte mal. Je refuse de prendre des antidépresseurs, peut être qu'un jour j'y viendrai mais ce sera comme vous dîtes en cas de vie ou de mort. J'ai eu quelques fois recours à des calmants, pas le choix mais j'ai fait en sorte que ça reste ponctuel. Ca me "shootait" tellement que j'ai même eu peur d'y avoir recours par facilité voire lâcheté, sans pouvoir plus m'en passer et que tout cela finisse mal. Hypercontrôle quand tu nous tiens!

    Encore merci pour votre témoignage.

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  6. "Car je pense que la dépression est un refus de l'esprit concernant soi-même, sa propre vie."

    Reprenant une de vos phrases Cédric, je vous remercie pour le partage de cette spirale dépressive qui vous a malheureusement affectée.
    Dans le récit de vos symptômes, j’y retrouve une similitude avec mes ressentis. Les ruminations en boucle, l’esprit focalisé sur la souffrance, l’absence de compréhension de l’extérieur et puis la dégringolade vers l’épuisement psychique et physique qui peut nous conduire à l’autodestruction.
    J’avais cette impression d’être comme un animal pris au piège, totalement apeuré et ne voyant pas d’issue pour s’en sortir. On se débat, on s’épuise… La réaction du corps a été terrible, un jour j’ai ressenti comme une scission de mes jambes et je ne pouvais plus rester debout. Je me suis traîné vers un endroit pour en finir, un endroit et un scénario qui j’avais répété dans ma tête maintes fois. Une image est venue à mon secours, celle de mes enfants et une parole de notre fils
    Je pense à celles et ceux qui malheureusement n’arrivent plus à capter la moindre image, la moindre parole pour résister au pire

    On ne peut comprendre véritablement les choses quand les vivant pleinement. Cette phrase peut paraître simple et être une lapalissade cependant il est difficile à ceux qui non pas connu la souffrance dépressive de comprendre l’autre qui en souffre, l’effort est peut-être déjà d’essayer d’entendre

    Comme vous, la remise en question s’est imposée et un cheminement a vu le jour depuis maintenant cinq ans. On apprend à mieux se connaître avec nos fragilités, nos limites, à mieux connaître la nature humaine afin de nous protéger. La méditation, la marche, la lecture, l'écriture sont devenus mes anxiolytiques quotidiens. Le temps permet peu à peu d’estomper l’angoisse de replonger, je garde à l’esprit que je reste vulnérable cependant avec de nouvelles forces pour résister

    PS : Vos vignettes illustrent bien vos propos Cédric.

    PS: En complément à votre réponse sur le billet "Manque de confiance", je pense que rester soi même en important toutefois dans certaines circonstances nous prenons un masque pour nous protéger également.
    J'ai beaucoup appris pour les animations de réunion des conférences de Christophe André. Pour celles et ceux que cela intéresse, je met en lien celle sur "L'estime de soi" :
    http://www.livestream.com/o2zonediffusion/video?clipId=pla_e8de2335-5769-48ec-926b-0e8a5a4a6c0d

    Bonne journée!

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  7. Eric bonjour

    Juste pour préciser que l'écoute de son corps est pour moi une des clé de la guérison. Savoir ne plus dépasser ses limites, ou en tout cas entendre les messages du corps nous prévenant qu'on en approche.
    Je crois que nous les entendons mais ne les écoutons pas parce que changer, c'est un effort, c'est un travail sur soi, cela nécessite de la volonté. Arrêter de se coucher tard, arrêter de (trop) boire, etc, toutes ces mauvaises habitudes ne sont pas à bannir mais à corriger, adapter...

    La vie doit rester une fête malgré tout...

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  8. Merci pour avoir partager ce témoignage poignant.
    C’est étonnant comme cette descente aux enfers ressemble à la mienne, à la notre car visiblement il y a plusieurs victimes de cette maladie des temps moderne.
    Et dire qu’il y a encore deux ans je ne connaissais même pas le mot : burn out.

    Les premiers temps on sent bien que quelque chose cloche,
    Au début je me sentais fatigué et un peu déprimé.
    Je me disais « c’est pas grave, tu te ressourceras le prochain week end et les vacances sont pour bientôt, » j’avais l’impression que la tristesse était sans doute passagère et que cela passerait.
    Je pensai pouvoir gérer…

    J’étais corps et âme dévouée à mon travail, à mes clients, à ma direction sans doute pour prouver quelque chose aux autres et sans doute à moi même.
    C’est mon coté perfectionniste et ma peur de décevoir qui m’a fait défaut.
    Il faut dire que le travail était aussi un bon moyen de me concentrer sur autre chose que mes états d’âmes.
    Même encore à ce jour, je ne comprends toujours pas pourquoi je suis plus ou moins « addict » au travail.

    Malgré mon état qui se dégradait, je m’accrochais, je serrai les dents, je me disais dit que ca allait passer, mais il était déjà trop tard.

    Malgré la fatigue les insomnies ont fait leurs apparitions.
    Le soir je m’endormais facilement à cause de la fatigue accumulée mais je me réveillais régulièrement en plein milieu de la nuit, puis impossible de me rendormir et de faire cesser mes pensées, mes ruminations.

    Très vite j’ai senti que je perdais totalement le contrôle.
    Mon état m’inquiétait, et rien ne m’apaisait.
    J’étais devenu irritable, impatient, limite agressif, je me sentais très contrarié sans vraiment savoir pourquoi.
    Les coups de spleen du début se sont transformés en une profonde tristesse.

    Je me cachais régulièrement dans ma salle de bain pour fondre en larme sans raison. Plus rien ne me fait envie, plus rien ne fait plaisir.
    Je n’avais plus d’appétit, j’ai rapidement perdu du poids.
    J’avais réellement l’impression que tout allait trop vite pour moi.
    Impossible de lire un livre par manque de concentration, difficile de regarder la TV car le flot d’image m’étourdissait.

    Ma compagne se rendait bien compte que qq chose n’allait pas, mais impossible de lui faire parts de mes sentiments, de mes émotions, j’étais bloqué, Je me suis renfermé sur moi même.

    Puis de très fortes angoisses ont fait leurs apparitions, je me sentais constamment en insécurité.
    Je me sentais complément désorienté avec des sensations de vertiges.


    J’avais l’impression d’être dans une rêve éveillé ou plutôt un cauchemar.
    Si je pensais pouvoir gérer seul la tristesse, j’ai été obligé de constater qu’il me fallait de l’aide pour mieux gérer mes crises de panique qui devenaient très invalidantes.
    Pourtant je n’osai en parler à personne tellement c’était absurde.
    (J’avais constamment peur d’avoir peur)

    J’avais l’impression de manquer de lucidité, tout était assez confus dans mon esprit.
    Je n’avais jamais connu cet état, je ne comprenais rien a ce mal être qui m’habitait continuellement.

    Le travail me semblait de plus en plus pénible mais malgré cela je m’accrochai pour tenter de m’occuper l’esprit et forcément je passais encore plus de temps au boulot sans être productif.

    Malgré toute la volonté du monde, je n’ai pas réussi à stopper cette spirale infernale qui m’a tiré vers le bas.

    Je pense que ce blog m’aurait aidé et m’aurait rassuré si j’avais pu le consulter à l’époque.

    Merci Cédric pour ce partage.

    Yannick.

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    1. Yannick bonjour.

      En lisant votre commentaire, je me suis reconnu point pour point. La lente descente, les symptômes, l'état étrange dans lequel on se sent, le perfectionnisme (mon principal défaut car EXCESSIF!), le besoin de reconnaissance etc... exactement tout me correspond.

      Ce qui me "rassure" est que cela n'est donc pas de la folie car je pense qu'elle serait propre à chacun (et là tous les symptômes semblent être commun) mais juste une mauvaise gestion de nos émotions, notre stress... Cette gestion s'apprend. Je pense que l'on peut sortir de cet état, des solutions existent. J'en ai expérimenté plusieurs (arts martiaux, footing, yoga etc), celle qui me correspond le mieux est la méditation et le footing.

      A chacun sa méthode...

      Bon courage et merci de votre témoignage également.

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  9. Bonjour Cédric,

    Ce qui est frappant c'est à quel point ton récit est similaire au mien

    J'aurais pu écrire le même texte car j'ai l'impression que c'est "ma vie" que tu décris.

    Cela arrive à beaucoup de gens et on se sent incompris, on souffre, on se sent seul, on croit que l'on devient ou que l'on est fou, on arrive plus à vivre "normalement", on s'isole, on pense à la mort pour s'affranchir de cette souffrance qui devient de plus en plus intolérable ... Une escalade très bien décrite qui est au final un passage obligé lorsque l'on s'écoute pas ou mal, lorsque l'on ne se comprend pas, que l'on répète les mêmes erreurs sans cesse, on se fatigue, on s'épuise et le burn out ou la dépression arrive comme le signal d'alerte ultime avant l'accident, l'hospitalisation ou la mort ...

    Finalement, lorsque l'on prend du recul, ce schéma est logique, notre corps est une formidable machine à survivre mais il faut savoir l'écouter, il envoie des alertes, faibles, moyennes, fortes, extrêmes, tant que le problème n'est pas compris ... Et si cela ne suffit pas, si l'on ne prend pas conscience de la chose, on tombe, le corps s'arrête, et la mort peut alors arriver par différent moyen !

    Le schéma est logique mais de comprendre les erreurs commises, les mauvaises stratégies employées, n'est pas toujours faciles, voir même indécelable sans une aide extérieur. L'introspection longue et coûteuse peut nous faire prendre conscience de certaines choses mais pas toujours. La bonne nouvelle, je pense, c'est qu'une fois que lon a pris conscience des mauvaises stratégies, bien souvent inconsciente, adoptées parfois depuis des décennies et qui peuvent être aussi le fruit de l'héritage génétique, il est dans la plupart des cas, je le pense aussi, possible d'y remédier.

    Possible d'y remédier oui mais pas d'un coup de baguette magique, il faut du temps et de l'énergie, il faut de la rigueur et de la régularité, car on ne fait pas partir de mauvaises habitudes, surtout inconscientes, ancrées depuis des lustres, en quelques jours et encore moins en confiant cela à quelqu'un d'autre qui va faire le travail à notre place.

    C'est un lutte, un combat difficile que de changer en profondeur et les mauvaises habitudes auront toujours tendance malgré tout à rentrer par les fenêtres lorsque la porte sera fermé !

    Je pense qu'il faut vraiment prendre conscience de cela, car il est facile de reprendre le même schéma une fois que les choses vont mieux et c'est l'erreur à éviter à tout prix et c'est l'erreur que la plupart font. Pourquoi ? Tout simplement, parce qu'en adoptant le même schéma, on aura de nouveau les mêmes conséquences, c'est bête et méchant !

    C'est très coûteux de changer, ça demande énormément d'investissement, de temps, de courage, de lecture, d'échange, de compréhension, de souffrance, d'impatience, et bien d'autres terme, mais il s'agit de mettre en place de nouvelles stratégies qui sur le long terme permettront le changement !

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    1. Bonjour Elfenlied et merci d'avoir lu mon billet...

      En effet, ce que je décris est aussi ce que j'ai pu lire parfois. Ce fonctionnement est une défense du corps ou plutôt de l'esprit. Nous sommes tous issus de la même espèce donc nous réagissons tous de la même manière. Moi personnellement, au moment le plus bas, où je me croyais fou, cela m'a rassuré de voir que mes symptômes étaient finalement connus et même communs et que donc, des solutions existaient (médicamenteuses ou spirituelles). Ce qui n'est pas le cas d'une maladie orpheline (ce que je croyais avoir).

      En ce qui me concerne, bien sur que mes vieilles habitudes reviennent mais avec le temps, elles ne perdurent plus. Au début, elles revenaient jusqu'à me replonger dans la dépression, puis, petit à petit, je les stoppais avant que cela n'aille trop loin. J'aime traîner le soir, manger n'importe quoi, ne pas trop faire d'activité etc. Maintenant, dès l’apparition de ces mauvaises habitudes, je les stoppes le plus tôt possible.... Et petit à petit, mon corps, mon esprit me le rendent bien en me mettant dans un état de bien être. Et même mieux, je ressens parfois un bien être comme rarement ressenti, même avant cet épisode dépressif. Je dirais même que la dépression m'a ouvert les yeux sur mon état "végétatifs" (j'extrémise un peu les mots là...). Je peux même dire que grâce à cet épisode, je me suis repris en main.

      Bien sur cela a été long : beaucoup d'efforts, de recherches, de lectures, de séances de psychothérapie. Des pleures, des moments de doutes etc... mais au final, une récompense : une sensibilité accrue, des plaisirs simples, une remise en question et donc, une "refonte" de moi même, de ma vision des choses...

      Je ne suis plus le même depuis tout cela... je pense être devenu quelqu'un de meilleur...

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  10. La question qu'il faut se poser je pense :

    Est-ce que je veux réellement changer et définitivement pour rentrer dans un cercle vertueux ou seulement m'affranchir d'une souffrance passagère par n'importe quel moyen mais sans trop m'investir et rester dans mon cercle vicieux ?

    Même si le fait d'être compris en ayant vécu la même chose permet de se rassurer un peu, je pense que cela est une bonne chose, mais ça ne suffit pas malheureusement. Ce qui est sûr c'est que ça permet de comprendre, d'échanger, de dédramatiser et de trouver "plus facilement" des pistes, des solutions, pour s'en sortir ! J'ai longtemps personnellement voulu m'en sortir tout seul avec ce sentiment intense que personne ne pourrait comprendre et m'aider, mais je pense que c'est l'erreur à ne pas commettre, en plus de toutes les autres ...

    En tous cas, échangeons, partageons et trouvons des solutions ensemble afin de vivre et de ne plus survivre ! ;)

    Bonne journée

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    1. Tout comme toi, j'ai voulu, fièrement, m'en sortir seul. 3 mois à souffrir. 3 mois à n'en parler à personne. A me poser des questions et trouver les (mauvaises) réponses...seul. M'orienter vers la mauvaise direction etc...
      Et un jour, je n'ai plus eu le choix. Je voulais vraiment en finir, 3 mois de souffrance intense, c'est trop dure....
      Tout a donc commencé par ma visite chez le médecin : erreur... ce genre de maladie nécessite un spécialiste : un psychiatre.
      La suite est décrite dans mon billet...

      Donc à ta question : pourquoi changer? au tout début, pour ne plus souffrir. Et par la suite, pour mieux profiter de la vie... pour soi et pour les autres, ceux qui m'entourent et qui tiennent à moi...

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  11. Bonjour,
    Je réalise un mémoire portant sur la conduite du changement et l’épuisement professionnel et j’aimerais pouvoir recueillir vos témoignages sur la manière dont vous avez vécu le changement au sein de votre entreprise.
    A noter que ce questionnaire est anonyme et que votre témoignage est important. J'aimerais montrer grâce à ce questionnaire l’importance du phénomène d’épuisement professionnel mais aussi que le facteur humain dans une conduite du changement est pour la plupart du temps négligé dans sa totalité.
    LIEN :

    https://docs.google.com/forms/d/1m_jg4sDKlVYNzcvFwiQIAMHA6vd7HyQv_g0FaSxVY0c/viewform

    Je vous remercie d’avance d’avoir accepté et consacré quelques minutes pour répondre à cette étude. Pour toute information supplémentaire je reste à votre entière disposition.

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    1. Bonjour Flone

      Participation effectuée. Je me tiens également à votre disposition si vous souhaitez recueillir d'autres témoignages. Si ma mésaventure peut servir à d'autres...

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  12. Bonjour,

    Merci pour ces témoignages poignants qui me font réaliser que je ne suis pas la seule dans cette galère du burn out/dépression. Je suis interne en médecine et mon burn out s'est révélé après un passage aux soins palliatifs non voulu mais rendu "obligatoire", sans l'encadrement nécessaire ni la possibilité d'exprimer sa souffrance quotidienne, impuissance totale face à des familles et à des patients que plus rien ne retient en vie et avec des demandes toujours plus importantes, et paradoxalement investissement de plus en plus poussé de ma part.

    J'ai sombré progressivement en devenant totalement apathique sans vraiment m'en rendre compte, plus aucun loisirs à côté car impossibilité de penser à autre chose qu'à mon travail, à la mort qui m'attendait tous les jours, tristesse permanente, repli sur soi...
    Puis départ en vacances désiré depuis très longtemps et là début des crises d'angoisses en lien avec des discussions sur la médecine, sans vraiment comprendre pourquoi car j'ai toujours aimé ce que je faisais... Toujours impossibilité de me détendre, de profiter du repos...

    Fin des vacances, je reprends le stage mais plus aux soins palliatifs. Et là c'est le début de la descente aux enfers que je n'avais toujours pas vue venir. Boule d'angoisse permanente dans la orge, nausées, incapacité à me concentrer sur les dossiers des patients, déconnection de la réalité à la pause du midi, tout ça bien sûr sans que personne ne s'en rende compte.

    Je craque suite à une garde des plus éprouvantes, impossibilité de dormir malgré la fatigue, et le lendemain matin impossible de me lever après une nuit blanche et crises de pleurs incessantes.

    Ensuite vient l'arrêt maladie, l'impression de devenir folle, ne plus pouvoir sortir de chez moi, ne plus reconnaître mes parents, éprouver du dégoût pour mes proches, me batte tous les jours contre mes angoisses et les nausées pour manger. Je me crois assez forte pour reprendre mon stage aux urgences mais je me rends compte que je ne suis plus la même, je n'ai plus aucune empathie, je me sens isolée de tout, le monde me parait glacial, je n'ai plus de sentiments, plus envie de rien, je trouve la vie complètement absurde et je ne comprends pas comment les gens peuvent encore y trouver un quelconque intérêt et l'envie d'en finir surgit brutalement.
    Mon psychiatre finit par me prescrire des antidépresseurs et des anxiolytiques qui me permettent de sortir un peu la tête de l'eau. L'envie et la projection dans l'avenir ne sont pas encore présentes mais j'espère sortir un jour de cette spirale infernale et retrouver ce goût de vivre que j'avais il y a encore très peu de temps...

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    1. Bonjour

      En effet vous n’êtes pas seule dans ce cas. Votre "dysfonctionnement" est
      normal, c'est le résultat de tous ceux qui se poussent à bout, à bout de force, à bout de fatigue, à bout de désespoir, à bout de désillusion etc...
      Ce que vous vivez est un ras le bol de votre esprit sur vos conditions. J'ai
      toujours considéré la dépression comme un "rejet", un rejet d'une partie de sa
      vie..
      Votre cheminement est le même que tous ceux qui ont vécu un burn-out.
      Tous les symptômes que vous décrivez sont ceux que j'ai vécu donc je vous
      comprends totalement.
      Votre cheminement sera donc le même que tous ceux qui s'en sortent, croyez moi.
      Même si vous aurez du mal à lire ce que je vais écrire, cela va vous changer à jamais mais positivement. Vous devez utiliser cette épreuve et non la subir.

      Mais pour le moment, attendez simplement que les médicaments agissent. Prenez le temps de vous reposer, essayez juste de vous apaiser, oubliez le travail juste le temps de vous remettre sur pied (je sais à quel point c'est difficile...)

      C'est l'heure de la remise en question... mais croyez moi, vous en sortirez
      grandit... Cela n'a pas changé votre nature, votre joie de vivre que vous aviez encore il n'y'a pas si longtemps. La dépression vous brouille juste l'esprit mais vous êtes toujours là...

      Si vous le souhaitez, je suis à votre écoute à l'adresse tasdam.blogspot.fr@gmail.com...

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    2. Merci beaucoup de votre réponse. Pour l'instant je me contente de réapprendre à vivre progressivement avec moins d'angoisses et au jour le jour (j'ai beaucoup mal à me confronter au regard des gens...)
      Je sais que chaque cas est unique mais j'aurais voulu savoir combien de temps avait été nécessaire pour vous avant de reprendre le travail ? J'ai déjà été arrêtée 4 semaines sans succès (rechute à la reprise avec épisode dépressif majeur), là ça va faire 6 semaines et bien évidemment la reprise n'est pas encore à l'ordre du jour...

      Merci de votre réponse.

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    3. Bonsoir

      Me concernant, j'ai eu un arrêt maladie de (seulement) 2 semaines malgré ma "très profonde dépression" (ce sont les mots du psychiatre). Je suis retourné au travail dans un état déplorable, mes collègues ne me reconnaissaient plus (amaigri et triste). C'était il y'a trois ans.... j'ai mis environ 2 mois à sortir la tête de l'eau. J'étais sous traitement Paroxetine (20mg) et Lysanxia (pris pendant 8 semaines "seulement").

      Prenez votre temps, si vous n'êtes pas prête, ne vous précipitez pas. Les rechutes pourraient vous décourager alors qu'elles ne sont pas du tout signe de faiblesse ou même d’échec, juste que vous n'avez pas encore repris les "commandes" ce qui finira par arriver croyez moi.... il faut juste patienter...

      En attendant, profitez pour vous reposer, le sommeil est très important... Essayez aussi de détourner votre attention pour ne pas ruminer sur votre état, il faut essayer de calmer la "tempête dans votre tête" (je ne parvenais plus à m'arrêter de penser à milles choses à la fois et donc impossible d'etre calme et serein... je me rappel même que j'avais une musique qui tournait en boucle dans ma tête, impossible à arrêter).

      Bon courage... et dites vous que cet état passera, je peux vous l'affirmer pour l'avoir vécu... vous le direz également dans quelques semaines...

      A bientot... Cedric

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