vendredi 5 juin 2015

La vie, la mort.... les émotions


Lors d'un week-end, je reçois un appel d'un membre de ma famille pour me dire qu'une de mes tantes, habitant proche de chez moi, ne donne plus de nouvelles. Elle ne décroche plus le téléphone et cela depuis plusieurs jours. Je suis donc missionné pour aller voir ce qui se passe.
Arrivé sur place, je frappe à sa porte, pas de réponse, ne serait-ce qu'une réaction dans la pièce principale de son petit apparemment. J'insiste, toujours rien, je clenche, porte fermée et toujours aucun mouvement. Au début je crois entendre une discussion mais ce n'est finalement que la télévision. Je fais le tour de l'appartement situé au rez-de-chaussée. Tous les volets sont fermés... à l'exception d'un qui tenait juste avec le loquet.Etant fumeuse, elle avait l'habitude de laisser ses fenêtres et volets entre-ouverts pour évacuer les odeurs, ce qui fut le cas ce jour. J'ouvre donc et l'appel d'un simple "t'es là?" Toujours aucune réponse. Ce jour là, il faisait beau et le soleil brillait. Mes yeux peinaient à s'adapter à la pénombre de la pièce qui s'ouvrait à moi.... jusqu'au moment où je vois sur son lit son corps allongé, comme endormi. Toujours sous l'effet de l'éblouissement, je l'appel aveuglément "hé, réveilles toi! hé ho!". Finalement la persistance rétinienne s'estompe, mes yeux s'accoutument à l'obscurité et les détails de la scène s'affinent et se révèlent, je finis par comprendre que le corps gisant est dépourvu de vie. La suite : appel des secours, intervention des pompiers, gendarmes, médecins et enfin pompe funèbres (je passe l'interrogatoire que j'ai subi car mort suspecte et donc enquête ainsi que le comportement (rires et autres blagues) des différents intervenants pour qui ce qui se passe n'est qu'une journée de travail ordinaire... mais je ne leur en veux pas, je les comprends même, c'est juste déroutant).
Cette tante a une histoire, celle d'une petite fille adoptée par mes grands-parents et donc élevée avec moi qui ai passé une grande partie de ma jeunesse chez eux. J'ai beaucoup de souvenirs avec elle et mes enfants l'aimaient beaucoup. J'avais beaucoup de plaisir à l'inviter à mes repas de famille...
Mais alors pourquoi ne suis-je pas plus triste que ça? J'étais perturbé, je m'endormais en pensant à elle et elle apparaissait dans mes rêves, mais aucune larmes ne me venaient.
S'ensuivent les cérémonies funéraires. Effusions de larmes et de tristesses, des adieux très difficiles de part la mise en scène de l’événement, le choix des musiques et des discours, tout était réuni pour la naissance des émotions... d'ailleurs certains craquent inhabituellement (membre de ma famille "à la larme difficile" et même une personne des pompes funèbres qui pleure en cachette!), mais moi toujours rien... je suis attristé bien sure, mais pas effondré, je ressens ce manque qui ne sera plus jamais comblé, comme pour toute longue séparation, mais la page se tourne vite, du moins, je crois, je l'explique comme cela.
Les cendres sont ensuite répandues au jardin des souvenirs de ma commune et cette fois c'est la fin. Son corps et son âme n'existent plus, ce n'est pas un cauchemar, c'est la réalité, ce qu'elle fut n'est plus.
Au jour de cette écriture je suis au lendemain de cet épisode tragique, j'ai pour habitude de tester mes émotions au travers de la musique, malgré la tristesse de celles choisies, je repense à elle avec joie et plaisir, ses petites bêtises d'enfants, ses petites anecdotes, tout ce qui faisait sa vie me revient et me donne du bonheur. D'ailleurs ce matin, je me sens envahi de joie, encore plus déroutant pour quelqu'un qui se demande pourquoi il n'est pas si triste.
Je pense qu'elle aurait préféré cela... je me dis peut être cela pour me rassurer...

Illustration : pendentif que je voyais accroché à son cou pendant mon enfance, il y'a plus de 30 ans... je le conserve en héritage...

8 commentaires:

  1. Peut être aussi que le rituel de cérémonie autour du décès est d'une lourdeur incomparable (même s'il était plutôt sobre) et que tu acceptes la réalité des choses sans avoir besoin de tout ça. Comme quelque chose que tu vois et que tu acceptes : "voilà, c'est comme ça. point barre." C'est de la lucidité !
    Nous avons comme mœurs et habitudes sociales d'être effondrés lors d'une cérémonie. Nous nous forçons un peu, j'en suis sûr.
    Chez certains peuples, les cérémonies accompagnant les décès sont festives. Ça fait réfléchir...
    Et n'oublions pas les petites chansonnettes comme celles-ci : https://www.youtube.com/watch?v=MB58PuNYO8o

    Bises.

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    1. Hey salut frangin... je crois qu'effectivement, je suis surpris de prendre mon indépendance émotionnelle... je veux dire que je ne ressens plus le besoin de pleurer parce que les autres pleurent mais que je laisse mon cœur parler... et là il n'avait rien à dire, juste assister aux adieux. Dans ce contexte, que tu as vécu également, peut être que je me suis dit que c'était finalement mieux pour elle? qu'au moins là où elle est elle ne souffre plus, et dans cette optique, c'est plutôt une fin heureuse...

      Je me suis toujours considéré comme différent, je n'aime pas les mêmes choses que tout le monde et ne ris pas des mêmes blagues... il faut croire que les émotions suivent le pas...

      Tchuss le Belge

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  2. C'est un joli billet qui nous rappelle que la mort fait partie de la vie...

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    1. Bonjour Sabrina, un plaisir de vous lire ici, "chez moi" ;-)

      Cela rappel aussi qu'il y'a plein de façon d'aborder ce sujet et que la vie continue pour les autres, autant qu'elle soit heureuse et pas embourbée dans les souvenirs triste...

      A bientôt

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  3. Plutôt poignant ce récit.
    Je ne pense pas que j’aurai aussi bien géré que vous.
    Visiblement vous allez bien, et sans doute que tout ce travail sur vous même et toutes vos réflexions vous rendent plus fort.
    Sincères condoléances,

    Yannick.

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    1. Bonjour Yannick

      Je pense qu'effectivement, sans parler de la pratique de la méditation et du sport qui aide à sortir des états dépressif, je m'efforce de penser différemment, ne plus m'arrêter à chaque instant difficiles mais plutôt à les regarder de loin et les laisser passer.... de toute manière, nous ne pouvons agir sur tout et donc certains événements se produisent qu'on le veuille ou non....j'attends donc la suite...

      A bientot

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  4. Bonjour Cédric,

    j'ai vécu exactement la même chose que toi le mois dernier avec mon oncle que j'ai trouvé mort chez lui ("mandatée" aussi, par la famille qui s'inquiétait), même chose que toi dans le ressenti de l'enterrement. Je ressens aujourd'hui une grande sérénité et je pense souvent à lui avec beaucoup de joie.
    Que de synchronicités dans nos vies...!
    Je ressens une évolution très grande au travers de ce texte, j'en suis infiniment heureuse.

    Pour ma part je commence à récolter les fruits de tout ce travail titanesque de déconstruction et reconstruction, c'est absolument merveilleux. Enfin...!

    A bientôt le Phoenix, une belle journée à toi ainsi qu'à ta famille :-)

    PS : on regarde les chevaliers du zodiaques en ce moment avec mes deux hommes, on s'éclate et j'adore le personnage de Phoenix, son histoire, je sais pas si tu as eu l'occasion de suivre ce dessins animé enfant. ;)

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  5. Salut toi

    Une fois de plus, quel drôle de hasard.
    En ce qui me concerne, cette expérience m'a fait grandir, je me sens encore plus responsable, peut être parce que je suis celui qui ai géré ses derniers instants, je l'ai accompagnée jusqu'au bout...

    J'ai bien connu les chevaliers du zodiaque, j'ai même adoré cette série pleine de leçons de vie (courage, honnêteté, fidélité (envers une cause) etc...). J'ai bien évidement adoré cet écorché vif de Phoenix.... cet été, je dois normalement me faire tatouer cet emblème, représentatif pour moi de renaissance.... le ferais-je?

    Bises

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